Côte d’ivoire : Pourquoi Gbagbo ne rentrera pas au bercail
Il a suffi que la liberté conditionnelle dont bénéficient Laurent Gbagbo et Charles Blé Goudé depuis le 1er février 2019, suite à leur acquittement deux semaines plus tôt, soit adoucie pour que leurs partisans mettent déjà en place le comité d’accueil à l’aéroport international Félix Houphouët-Boigny. Ils pourraient cependant très vite déchanter.
72 heures après la décision de la Cour pénale internationale, les parents des victimes de la crise post-électorale de 2011 (qui a fait quelque 3000 morts) ont en effet manifesté à Abidjan pour dire non au retour de l’ancien président et de celui qui fut son « ministre de la ‘’rue publique’’ ».
Que les manifestants aient battu le pavé de leur propre chef ou qu’ils aient été stipendiés par le pouvoir, Alassane Dramane Ouattara pourrait, le moment venu, exciper de ce tir de barrage des ayants droit pour empêcher le retour au bercail de l’enfant terrible de Ouragahio. Au motif qu’un tel événement pourrait troubler l’ordre public. Si donc jeudi dernier, « le Woody » a fait un grand pas dans le long tunnel qui mène à la liberté, il n’est pas pour autant au bout de ses peines.
En levant en partie les conditions imposées à la libération des incriminés, la chambre d’appel de la CPI permet à Gbagbo ainsi qu’à son co-accusé de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, de quitter leur ville de résidence (respectivement Bruxelles et La Haye) où ils étaient judiciairement confinés. Théoriquement, ils sont donc libres ou presque. Libres dorénavant de voyager, d’aller où bon leur semble, pourvu que ce soit dans l’un des 123-Etats parties au statut de Rome dont …la Côte d’Ivoire, question de pouvoir mettre la main sur eux à tout moment en cas de besoin puisqu’ils sont toujours dans l’attente de leur éventuel procès en appel. Encore faut-il d’ailleurs que le pays d’accueil qu’ils auront choisi accepte de les recevoir.
Et c’est là où ça pourrait se corser pour les anciens pensionnaires de la prison de Scheveningen. A quelque cinq mois de la présidentielle, on ne voit effectivement pas trop comment ADO pourrait donner un tel visa d’entrée qui provoquerait inévitablement des vagues politiques au bord de la lagune Ebrié.
De ce fait, ce qui va se passer, c’est que …rien ne va se passer. En tout cas pas maintenant, pas avant le scrutin. Tout au plus le futur président, une fois l’orage électoral passé, pourra-t-il poser un acte fort dans le sens de la réconciliation en acceptant que le septuagénaire qui n’aura peut-être plus dès lors d’ambitions présidentielles, regagne la mère-patrie.
N’oublions du reste pas que l’ancien locataire de la résidence de Cocody et son compagnon d’infortune ont été condamnés par la justice ivoirienne à vingt ans de prison et s’ils s’avisaient de rentrer malgré tout dans les jours ou les semaines à venir, ce serait à coup sûr pour aller directement de l’aéroport à la MACA. Un tel risque vaut-il la peine d’être pris pour des gens qui ne sont pas encore totalement sortis d’affaire après neuf longues années de procédure et de jugement ?
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