Système D au Burkina: Quand le commerce de galettes fait vivre Madame Thiombiano Djénébou et famille
La vente de galettes, de la bouillie de mil et divers jus traditionnellement faits, sont une occupation permanente pour madame Thiombiano. Depuis une vingtaine d’années elle fait des galettes non loin de zaabr daaga et sur deux autres sites à Ouagadougou. Ses galettes sont prisées par les ouagalais et l’affluence y est grande. Nous y avons fait un tour pour mieux percer son mystère.
Une dame, une histoire, une amitié avec le commerce. Elle, c’est madame Thiombiano Djènèbou vendeuse de galette à Ouagadougou non loin de zarbr daaga. Il est 13h54 quand nous foulons le sol de la cour de dame Thiombiano. Devant le portail, un dispositif de lave-main impressionnant nous accueille. Les effets bien en ordre, la propreté des lieux est bien assurée. Dans la cours, une dame se démène à retourner des galettes en cuisson dans une poêle spéciale. C’est une des employées de madame Thiombiano. Madame Djenèbou Ouédraogo qu’elle s’appelle. Tête baissée, ces mains sont en perpétuel mouvement pour retourner les galettes sur leurs différentes facettes. L’odeur qui s’en dégage convainc notre adorât et nous donne envie d’en déguster. Outre dame Ouédraogo, la cour est bondée de filles et de femmes affairées à plusieurs tâches. La fine pluie de ce 3 septembre, ne les empêche pas de s’activer à rejoindre les différents sites de ventes de galettes et de bouillie de madame Djènèbou Thiombiano. Pendant que les unes acheminent les fûts remplis de bouillie par des charrettes, les autres sont déjà au four et au moulin pour apprêter des galettes pour les clients qui viennent s’approvisionner au domicile des Thiombiano. « Djènè, je peux avoir galettes 500 ? » dit un client, l’œil rivé sur la vendeuse.
« Ce métier est un héritage », clame madame Thiombiano qui ajoute que sa grande mère se dérouillait avant elle dans le commerce des galettes. C’est depuis une vingtaine d’années qu’elle a pris la succession et fait le bonheur des Ouagalais, surtout ceux qui sont dans son pré carré. « Sa bouillie nous inspire », confie Aristide Sakande venu acheter des galettes et de la bouillie. Et pour Remis Ki, les yeux fermés, il reconnaîtrait au gouter, la bouillie de « tantie », surnom affectueux que beaucoup de ses clients ont donné à dame Thiombiano.
Bien faire et propreté : les secrets de tantie Djènèbou
Comment madame Thiombiano explique le succès de ses produits : galettes, bouillie et jus ? Pour elle, l’hygiène est son secret pour fidéliser ses clients. Accusée de faire du « wak »1 vue l’affluence sur ses sites de ventes, elle a laissé entendre que s’il y a « wak » c’est bel et bien le cadre sain de ses lieux de ventes. Un client venu à zaabr daaga depuis Ouaga 2000, abonde dans le même sens : « La particularité de cette dame c’est l’hygiène et la propreté des lieux » Aux dires d’autres clients, madame Thiombiano met du siens pour préparer ses galettes, sa bouillie et ses jus : du traitement du petit mil, la matière première, jusqu’au produit final. A cet effet, les femmes se réveillent à 3h du matin, pour laver le petit mil afin de le débarrasser de ses impuretés tels les grains de sables. Après le traitement du petit mil, l’étape suivante qui consiste à faire des grumeaux pour la bouillie est délicate, selon madame Thiombiano qui affirme qu’elle s’applique à bien les faire.
Ces prêts bancaires qui se font désirer
Parti dans ce commerce avec un capital initial de 5000 FCFA, madame Thiombiano fait aujourd’hui un chiffre d’affaires journalier de 200000f à 500000 FCFA suivant les périodes de l’année : « Je peux avoir 500000f par jour, pendant le mois du jeûne musulman » dit-elle. Sans un soutien quelconque, elle emploie environ une vingtaine de femmes et de filles. Ce nombre peut évoluer pour cumuler à 50 employés au mois du ramadan. Les visages détendus, le sourire aux lèvres, les employées affirment être fière de travailler avec « tantie ». Grâce à ce travail, elles arrivent à subvenir à leurs besoins.
Participer à la résolution de l’épineuse question du chômage est l’un des soucis de cette battante. Encore faut-il qu’elle soit accompagnée dans son système D, avec des prêts bancaires afin que, au-delà de nourrir sa famille, elle participe au développement du secteur de la restauration au Burkina, trop sous la coupe de l’informel.
1.« wak » : pratiques occultes pour attirer un pouvoir surnaturel à même de garantir une protection à une personne ou des chances de succès d’une activité, d’un projet.
Camille Baki