Insurrection populaire : Des blessés parlent des séquelles qu’ils traînent depuis six ans
L’Association des blessés de l’insurrection populaire au Burkina Faso (ABIP/BF) était face à la presse ce mardi 22 septembre 2020. Dans la cours de la Maison des jeunes de Ouagadougou, ils sont revenus, d’une part, sur les séquelles qu’ils vont porter pour le reste de leur vie, et d’autre part sur leurs camarades qui attendent toujours des soins.
«En les voyant, on sait que ça ne va pas ». Cette phrase, plusieurs journalistes l’ont utilisé pour décrire l’apparence des conférenciers du jour. Ces hommes de medias étaient cependant loin de se douter à quel point ils pouvaient avoir raison. En effet, après la lecture de la déclaration liminaire, les membres de l’Association des blessés de l’insurrection populaire au Burkina Faso (ABIP/BF), interrogés sur leur état de santé, se sont successivement passé la parole pour permettre à chacun de décrire son mal-être.
Si certains ont préféré se mettre debout pour montrer les difficultés qu’ils ont pour marcher, d’autres ont évoqué les interventions chirurgicales qu’ils ont subies, les problèmes qu’ils ont à poursuivre leurs activités et les douleurs qu’ils ressentent au quotidien. « Moi j’ai une fracture de la boîte crânienne. Depuis, j’ai des problèmes de motricité et je n’ai plus d’odorat. Ma famille est obligée de me faire ma toilette pour m’éviter d’indisposer les autres », a confié le président de la coalition, Dramane Ouédraogo, qui n’a pas pu s’empêcher de verser des larmes.
Selon ses précisions, l’ABIP/BF compte 256 membres. Depuis l’époque de la Transition, environ sept ont pu être évacués. C’est le cas de Lassina Dao, Patrice Kéré et Issouf Nakanabo qui sont allés en Tunisie. Deux autres ont bénéficié d’interventions chirurgicales grâce au HCRUN. Il reste cependant une dizaine de personnes qui attendent toujours une prise en charge.
Abas Ilboudo se confie en mooré
Aujourd’hui âgé de 19 ans, Abas Ilboudo a été touché au pied lors des évènements. Evacué trois fois au Maroc, il a été opéré neuf fois. « On a prélevé des os, de la chair et de la peau dans certaines parties de mon corps pour les greffer au niveau du pied. Il y a 4 ans, je devais repartir pour la dernière opération mais le gouvernement n’a pas encore réagi. Quand il fait froid, je ne peux rien faire, je souffre », s’est-il ouvert.
Le président de l’association a aussi soulevé le cas d’Innocent Gnanou qui a perdu un œil et qui a été envoyé en France où il a subi une dizaine opérations pour la pose d’un implant. « Aujourd’hui, il est abandonné à son sort et il vit dans ce pays comme un sans domicile fixe », dixit Dramane Ouédraogo qui, sans occulter les efforts déjà faits par le gouvernement, a tenu à délivrer un message aux autorités, surtout que nous sommes à quelques semaines de l’an six de l’insurrection: «A la veille de la commémoration, vous envoyez une délégation de plusieurs ministres à la rencontre des victimes. Vous recueillez nos doléances et une fois la commémoration passée, impossible de vous revoir. Si vous ne pouvez pas nous prendre en charge, au moins ayez du respect pour nous», a-t-il lancé, non sans interpeler le ministre de la Santé sur le dossier de la carte de santé qui leur permettra de se faire prendre en charge en cas de rechute.
Dans cette vidéo, Constant Bassolé, lui, montre les blessures qu’il a eues pendant ces évènements.
Zalissa Soré