Société

Boi Tarcisio : cet italien qui vend du porc au four

De son Italie natale, il est venu au Burkina Faso dans le but de faire des affaires. Mais les choses ne se sont pas passées comme prévu. Tant et si bien que Boi Tarcisio s’est lancé dans le commerce de la viande de porc. Un métier qui  ne lui est pas vraiment étranger puisqu’il est né  de parents grilleurs de viande. Mais la couleur de sa peau fait de lui un  vendeur singulier à quelques encablures du cimetière de Gounghin où il officie.

L’odeur de cette cuisson de Boi Tarcisio ne vous laisse pas indiffèrent

A votre arrivée ou seulement de passage, l’odeur du porc four vient caresser vos narines. Il est difficile d’y résister, votre odorat finit par succomber. « Porc au four chez Tarcisio » indique un panneau sur lequel figure le dessin d’un cochon appétissant. Un goret embroché tourne sur un feu au charbon de bois. Nous sommes en face de la cuisson de Boi Tarcisio. Un homme, petit de taille, la peau claire, un « naasara » comme le disent les mossi, fait le tour  pour s’assurer que la préparation se passe bien. Il donne par moment quelques coups de couteau sur certaines parties de l’animal.

Pendant ce temps, les quatre jeunes qui l’aident apprêtent l’assaisonnement qui va accompagner la viande.  Les uns pilent le piment et les autres débarrassent l’ail et le persil de leurs impuretés. L’ensemble combiné donne une mixture appétissante, laquelle pâte, relèvera le goût du plat. « Il s’y connaît», affirme Boris Bado, un client bien connu de cet expatrié. Satisfait du travail de Boi Tarcisio, il ne calcule plus la distance qui sépare son quartier de Zogona de cette “vianderie“. Pour lui, quand c’est bon la distance ne saurait être un obstacle. « Avec  Boi on repart toujours heureux » se réjouit-il en se pourléchant les babines. Et pour lui, la particularité c’est le barbecue. Il explique  que la grillade par rotation permet de sécher  l’animal en le vidant de son eau, mais aussi de le dégraisser. En plus de cette manière de cuire, il y ajoute un peu de sel, ce qui lui fait dire que sa viande est bio. C’est à l’issue de d’une cuisson de 2h à 3 heures, que l’Italien vous offre sur un plateau ce pur délice pour vos papilles. Le tout arrosé de bière fraîche que madame Boi sert.

c’est à l’âge de 13 ans qu’il a été initié à la cuisson

Un héritage familial

Notre cuistot se considère comme un vendeur « accidentel ». Il a en effet échoué dans ce créneau, après avoir été victime d’une escroquerie qui l’a dépouillé de tout. Bien qu’il soit issu d’une  famille de grilleurs, où il a été initié à l’âge de 13 ans à la cuisson, il travaillait dans une usine en Italie comme mécanicien. « Le barbecue est une tradition chez nous » a-t-il expliqué. C’est après que des burkinabè vivant dans la “Botte“ lui eurent parlé de leur pays qu’est né son désir de connaître le Burkina Faso. Ainsi il foulera le sol du pays des hommes intègres en février 2010. A défaut de faire des affaires, il replonge dans le métier de boucher. Pour lui ce choix se justifie naturellement car dit-il « je savais le faire et j’ai décidé de le faire ». Et de conclure « voici que ça marche bien ici » s’exclame-t-il. 

                                          La parenté à plaisanterie

« Boi, la viande est prête ? » lance avant même de s’asseoir un chaland connu comme le loup blanc. « Petit Bissa esclave », répond celui qui, à force d’enfourner des porcelets, semble être devenus un gourounsi, cette ethnie dont les membres sont réputés excellé dans le domaine. Mais que sait-il de la parenté à plaisanterie? Pour lui, c’est un remède de bonne humeur et un facteur de cohésion sociale. Ce trait culturel, il l’a découvert en Italie  grâce à nos compatriotes  vivant dans cette partie de l’Europe du sud. Une fois au Burkina, il l’intègre d’autant plus facilement qu’il a épousé une native du Sanguié, avec qui il a eu deux enfants. Ainsi il s’érige en chef des Bissa car beau des Gourounsi, parent à plaisanterie des premiers.  Et de citer Réo et ses confins, Didyr, Bonyolo etc. pour montrer qu’il est devenu Bassolet, Bayala ou Bamouni.

L’homme ambitionne crée une école de cuisine

                                                    Cuisine-école

La trentaine bien sonnée, habitant de Dayongo, ce jeune étudiant en dessin et bâtiment, a été attiré par la méthode de Boi et est venu à son école. Il nous confie, qu’il a été impressionné par le travail de ce « naassara ». C’est pourquoi, il souhaite se faire initier par le chef Tarcisio. « J’ai déjà un kiosque, si j’arrive à faire comme vous, je formerai un enfant à mon tour. Ainsi je pourrai vaquer à mes occupations dans le bâtiment ». s’est-il expliqué. Un exposé qui semble avoir convaincu le maitre, lequel ambitionne du reste créer une école de formation à la cuisson de porc au four et entend étendre, bientôt, son commerce à d’autres grillades. « Ça va. Je ne regrette pas de m’être lancé»  conclut-il en jetant un regard attendri sur le PF qui est maintenant bien doré.

Camille Baki

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