Vente de brosses à dents traditionnelles : une bonne affaire en temps de jeûne musulman

C’est connu, le jeûne musulman va de pair avec de nouvelles habitudes au quotidien des fidèles. Au nombre de ces habitudes, il y a l’usage des morceaux de branchettes d’arbres comme brosses à dent à longueur de journée. Auprès de vendeurs et clients rencontrées non loin de la Grande mosquée de Ouagadougou, nous avons appris davantage sur ces brosses à dents traditionnelles qui, selon une prescription du prophète Mahomet, seraient bénéfiques aux jeûneurs.  

Des fagots de petites branches multiformes et multicolores, il n’est pas rare d’en trouver à tout bout de champ dans les environs de la Grande mosquée de Ouagadougou. Par endroits, ces tas de branchettes vous feront vite penser au bois de chauffe utilisé en campagne. Pourtant elles servent plutôt de  brosses à dent pour de nombreux mahométans. Il y en a pour toutes les bourses, il y en a aussi pour toute quantité et toute qualité souhaitées.

Assane Sana en est vendeur. Il y a quatorze ans, il faisait ses premiers pas dans ce commerce du sigdré (brosse en langue mooré). Aujourd’hui, son échoppe qui jouxte la Grande mosquée de la capitale grouille de semi-grossistes et petits acheteurs. A vrai dire, ces tiges d’arbres ou d’arbustes coupées dans les brousses africaines ont aujourd’hui peu de secret pour le quinquagénaire. « Certaines branches proviennent d’espèces burkinabè, tandis que d’autres sont importées du Togo, du Ghana du Niger ou de la Côte d’Ivoire », nous explique-t-il.

Certes, la vente de ces brosses est un gagne-pain pour Assane, mais il confie que ce commerce n’est qu’une bonne affaire en temps de jeûne musulman. « En ce temps de carême, les branchettes s’achètent vraiment comme de petits pains », assure le commerçant. Tout en se gardant de trahir le secret de son chiffre d’affaires, il a détaillé que ses recettes journalières qui s’élèvent à environ 5 000 F CFA en temps ordinaire, « ont grimpé à un niveau très satisfaisant » depuis le début du jeûne, à l’image de la grande affluence dans les mosquées.

« C’est d’abord une mesure d’hygiène »

Qu’est-ce qui explique cette hausse de la demande de ces cure-dents pendant le jeûne musulman ? Assane Sana a sa petite idée : « c’est une prescription du prophète Mahomet qui a recommandé que dans la mesure du possible, tout musulman se nettoie la bouche avant de procéder aux ablutions. En fait, c’est une action de purification selon laquelle l’haleine de la bouche du jeûneur plait à Son Créateur mais à la seule condition que cette haleine soit exempte des impuretés provenant des aliments. »

L’imam Ismaël Tiendrébeogo, du Cercle d’études, de recherche et de formation islamiques (CERFI), va au-delà de cette esquisse d’explication. Selon lui, le nettoyage des dents est d’abord une mesure d’hygiène avant d’être un acte méritoire vis-à-vis d’Allah. « Quand le prophète rentrait chez lui, la première des choses était de se nettoyer la bouche. » Et si cette cure est recommandée avant d’accéder à la mosquée, c’est  pour que la mauvaise haleine ne gêne pas la prière, a expliqué le leader religieux, ajoutant qu’à défaut du cure-dent, une brosse à dent accompagnée d’une pâte dentifrice est aussi utilisable par les fidèles.

Ces explications suffisent pour que le cure-dents ne manque pas dans le quotidien de nombreux musulmans. Autour de la Grande mosquée, devant des commerces détenus par des mahométans, ces brosses à dents à l’africaine font partie des objets de piété les plus en vogue. Et si ces cure-dents sont plus ou moins ignorés par certains fidèles, ils ne quittent pas par contre la bouche d’autres croyants qui semblent ne jamais se lasser d’en mastiquer et de cracher.

Bernard Kaboré