Côte d’Ivoire : ADO et Gbagbo parlent de réconciliation
Comme annoncé quelques jours plus tôt, le président ivoirien, Alassane Ouattara et son prédécesseur, Laurent Gbagbo se sont rencontrés ce mardi 27 juillet 2021 au palais présidentiel d’Abidjan. Une première depuis le retour au pays de l’ex-chef de l’Etat qui, suite à la crise post-électorale de 2011, a été contraint à l’exil, jugé à la Cour pénale internationale pour crimes de guerres avant d’être acquitté. Au palais d’Abidjan, les deux hommes qui ne se sont donc plus vu en personne depuis dix ans ont parlé de réconciliation nationale.
Avec une petite délégation, Laurent Gbagbo est arrivé au palais présidentiel quelques minutes après 17 heures. Quand son véhicule vient garer devant le perron, Alassane Ouattara l’y attendait déjà. Tout sourire, dans une chemise blanche, tel qu’on l’a vu à l’aéroport Houphouët-Boigny le 17 juin dernier, l’ex-président enfile un masque lorsqu’il sort de la voiture avant de se diriger vers son vis-à-vis qui lui tend les bras ouverts. « Je suis content de te voir », a confié Alassane Ouattara à son vieil adversaire politique, non sans lui rendre le même sourire. Après avoir quitté leurs masques, les deux hommes se prêtent aux clichés de plusieurs dizaines de journalistes et photographes présents avant de s’engouffrer, main dans la main, dans le palais pour un tête-à-tête à huis clos.
Dans le temps d’attente de la fumée blanche, les commentaires ont inondé les réseaux sociaux. Tous s’accordent à le dire, c’est un moment historique, d’autant plus qu’Ado et “le Woody de Mama” ne s’étaient plus vus en personne depuis 10 ans. En cause, Laurent Gbagbo, suite à la crise post-électorale de 2011 qui a fait officiellement 3000 morts environ, a été poursuivi par la Cour pénale internationale pour des faits crimes de guerre et de crime contre l’Humanité. Jugé et acquitté, le leader du Front populaire ivoirien qui s’est toujours revendiqué la victoire de la présidentielle a regagné son pays le 17 juin dernier, et cela, au terme de tractations avec les autorités de Yamoussokro.
Il va sans dire que les deux hommes d’Etats avaient beaucoup à se dire à cette rencontre du 27 juillet. Et pas moins d’une heure a suffi pour cela. Mais que se sont-ils dit ? Il a surtout été question de paix et de réconciliation nationale, si l’on s’en tient aux déclarations faites par l’un et l’autre au sortir de l’entrevue. C’est d’abord Laurent Gbagbo qui a pris la parole, faisant savoir qu’il a demandé la libération de toutes les personnes emprisonnées suite aux évènements de 2011 et dont il était leur «chef de file ». « J’ai insisté sur ça. Cette question mise à part, nous avons parlé de la Côte d’Ivoire qui doit aller de l’avant. Qui doit marcher, qui doit se parler, qui doit discuter », a indiqué l’ex-chef de l’Etat, se permettant entre deux phrases de tutoyer son successeur en lui demandant de confirmer ses propos. « Merci mon cher Laurent, merci d’être venu à cette rencontre que tout le monde demandait sans savoir que nous nous sommes déjà parlés , que nous sommes des amis depuis des décennies, ce qui ne nous rend pas jeune d’ailleurs », a renchéri Alassane Ouattara, le ton empreint d’humour. Et d’ajouter : « je voudrais que nous puissions nous féliciter d’avoir tenu cette rencontre, qui a été cordiale et fraternelle. Laurent est mon jeune frère, mon ami, c’est vrai qu’il y a eu cette crise qui a créé des divergences, mais cela est derrière nous. Ce qui importe, c’est la Côte d’Ivoire, c’est la paix pour notre pays».
Dans la dynamique de la réconciliation, les deux hommes ont convenu de se retrouver de temps en temps, annonçant une prochaine rencontre après la célébration de la fête nationale en août prochain.
Bernard Kaboré