Réunion délocalisée du Parlement de la CEDEAO sur l’énergie : Le faible accès des populations à l’électricité, un défi à relever
Pour sa quatrième réunion délocalisée de l’année 2021, le Parlement de la CEDEAO s’est penché sur un thème aux grands enjeux pour le développement des pays membres : l’efficacité énergétique. En effet, du 10 au 14 août dernier, les membres de sa commission mixte, énergie et mines; industrie et secteur privé; Agriculture, Environnement et Ressources naturelles; Infrastructure; assistés par des experts, des cadres de l’administration parlementaire et de la Commission de la CEDEAO ont planché sur cette importante problématique.
Dans l’entretien qui suit, l’honorable Nimayé Nabié, député burkinabè au Parlement communautaire où il est rapporteur de la commission industrie et secteur privé, revient sur l’importance de la réunion d’Abidjan et les conclusions qui en sont issues.
La commission mixte, énergie et mines; industrie et secteur privé; Agriculture, Environnement et Ressources naturelles; Infrastructure, du Parlement de la CEDEAO a tenu une réunion délocalisée sur comment assurer l’efficacité énergétique en Afrique de l’ouest. Qu’est-ce qui a justifié le choix de ce thème ?
Le bien-fondé de ce choix thématique vient du fait que la question de l’énergie est au cœur des économies des pays de l’espace communautaire et les enjeux imposent aux États membres de la CEDEAO des stratégies transnationales.
Afin de soutenir durablement la politique régionale d’efficacité énergétique, les parlementaires que nous sommes, avons eu besoin de nous appesantir sur les contours du thème de cette réunion en faisant ressortir les défis et les solutions proposées par la CEDEAO.
Outre les parlementaires, qui d’autres a pris part à cette réunion et comment se sont déroulés vos travaux ?
A propos des participants, outre les parlementaires au nombre de trente-neuf (39) dont le Président du Parlement, l’honorable SIDIE MOHAMED TUNIS, les autres sont venus de la délégation de la Commission de la CEDEAO composée de quatre (04) membres, conduite par le président , Jean Claude KASSI-BROU ; des agences de la CEDEAO représentées par deux (02) responsables ; des experts du domaine lié au thème au nombre de trois (03); les membres du staff du Parlement au nombre de seize (16); et une quinzaine d’invités locaux dont les présidents de l’Assemblée nationale et du Sénat de Côte d’Ivoire, le ministre des Mines, du Pétrole et de l’Energie et le ministre délégué auprès du ministre d’État, ministre des Affaires Étrangères, de l’Intégration Africaine et de la Diaspora, chargé de l’Intégration Africaine.
Quant au déroulement des travaux, les parlementaires communautaires de la réunion délocalisée de la commission mixte ont adopté l’ordre du jour et le programme des travaux dont les points forts ont été la cérémonie d’ouverture suivie de la photo de famille et de la conférence de presse ; l’examen et adoption du projet d’ordre du jour et du programme de travail de la réunion ; les communications des experts et personnes ressources ; les débats sur les communications ; les visites de courtoisie aux autorités ivoiriennes et de terrain ; la rédaction du projet de rapport et des recommandations de la réunion ; l’examen et l’adoption du projet de rapport et des recommandations de la réunion suivis de la séance de clôture.
Les problèmes énergétiques ne sont pas les mêmes d’un pays à un autre dans l’espace de la CEDEAO. Les participants ne sont-ils pas tombés dans le piège d’une tour de Babel, chaque délégation mettant en avant les propres problèmes de son pays ?
C’est vrai que les problèmes énergétiques ne sont pas les mêmes d’un pays à un autre dans notre espace communautaire, mais de là à tomber dans le piège d’une tour de Babel comme vous le dites ne serait pas profitable et juste pour nos Etats. Comme l’a si bien rappelé le président de la Commission, monsieur Jean Claude KASSI-BROU, lors de son discours à la cérémonie d’ouverture, la CEDEAO fait face à de nombreux défis dans le secteur énergétique notamment en matière d’énergie électrique, caractérisé par un faible taux d’accès à l’électricité ainsi que les difficultés financières des sociétés nationales d’électricité liées à la gouvernance et à des pertes techniques et commerciales élevées. Pour faire face à cela, la CEDEAO, en complément de la Direction de l’Energie et des mines qui est d’ailleurs dirigée par notre compatriote, Bayornibè DABIRE, a créé des agences spécialisées chargées de mettre en œuvre la politique énergétique régionale par le regroupement des 40 sociétés d’électricité dans un mécanisme de collaboration à travers le Système d’Echanges d’Energie Electrique Ouest Africain (EEEOA) grâce auquel neuf pays de la région sont interconnectés à ce jour.
Quelles sont les principales conclusions auxquelles vous êtes parvenues à la fin de cette réunion délocalisée ?
Les principales conclusions qui ont retenues mon attention sont, entre autres , le renforcement des capacités des honorables députés afin de les amener à prendre plus de responsabilité dans le soutien et le contrôle des actions des gouvernements dans la mise en œuvre des projets et programmes de développement communautaire, et en même temps, mener un plaidoyer pour le renforcement des compétences du Parlement de la CEDEAO afin de doter celui-ci des pleins pouvoirs d’un organe législatif et de contrôle en vue de lui permettre de disposer de tous les moyens de pression nécessaires pour faire avancer les objectifs d’efficacité énergétique ; l’engagement des pays de la CEDEAO dans ce processus et sur un changement de paradigme dans le développement des ressources énergétiques de la région. Ce sont surtout les recommandations adressées aux Etats-membres de la communauté.
Comment avez-vous envisagé la participation citoyenne pour résoudre cette problématique hautement technique d’assurer l’efficacité énergétique dans les pays de la CEDEAO ?
A mon avis la participation citoyenne demeure un élément clé de la politique d’efficacité énergétique. Elle appelle de la part des populations, une prise de conscience pour une utilisation rationnelle de l’énergie et de la part des gouvernements, à l’instauration d’un cadre de concertation réunissant toutes les parties prenantes à l’atteinte des objectifs d’efficacité énergétique
L’objectif poursuivi dans ce sens par les parlementaires consiste principalement à tisser des liens plus étroits avec les citoyens de la communauté de l’Afrique de l’Ouest. Il s’agira ainsi pour le Parlement de la CEDEAO, en tant qu’outil de renforcement de la démocratie régionale, de soutenir la Commission de la CEDEAO dans la mise en œuvre de ces programmes afin d’assurer l’efficacité énergétique dans les pays.
Je suppose qu’une mention spéciale a été faite pour le développement de l’énergie solaire dans nos pays. En quoi faisant ?
Oui cela est juste et certaines des recommandations formulées à l’endroit des Etats-membres vont dans ce sens. Il s’agit par exemple de la mise en application de l’article 5 de l’Acte additionnel adoptant le plan directeur de la CEDEAO pour le développement des moyens régionaux de production et de transport d’énergie électrique 2019-2033, relatif à la mise à disposition de sites en zone franche pour abriter les parcs solaires régionaux en vue de promouvoir le développement des énergies renouvelables ; de l’encouragement des sociétés d’électricité à saisir la portée réelle de l’importance des énergies renouvelables et d’effectuer les changements de stratégie pour son développement
De vos recommandations, lesquelles intéressent le plus le Burkina ?
Le Burkina est dans l’espace communautaire de l’Afrique de l’Ouest qui a ses règles et les citoyens burkinabè que nous sommes, avons tissé des liens étroits avec les autres citoyens de la communauté dans son ensemble pour une bonne intégration. Partant de toutes les réalités, vous me demandez les recommandations les plus intéressantes pour notre cher pays. De prime abord, je dirai que toutes intéressent le Burkina compte tenu du fait qu’elles sont adressées à l’ensemble des Etats-membres de la CEDEAO sans exception.
Cependant les recommandations ci-après retiennent mon attention : la demande adressée aux gouvernements de prendre activement des mesures pour réduire les tarifs de l’électricité afin d’encourager les utilisateurs du secteur commercial et industriel à utiliser l’électricité et contribuer à la création d’emplois ; la récommandation faite aux gouvernements d’identifier clairement les domaines susceptibles de contribuer à la réduction de la pauvreté et mettre en œuvre des politiques énergétiques propices devant stimuler la croissance et encourager la création d’emplois ; la récommandation aux Etats-membres de mettre en application l’article 5 de l’Acte additionnel adoptant le plan directeur de la CEDEAO pour le développement des moyens régionaux de production et de transport d’énergie électrique 2019-2033, relatif à la mise à disposition de sites en zone franche pour abriter les parcs solaires régionaux en vue de promouvoir le développement des énergies renouvelables ; la récommandation aux gouvernements d’élaborer des programmes d’éducation et de sensibilisation ainsi que des initiatives de promotion des choix énergétiques respectueux de l’environnement et de l’efficacité énergétique dans les écoles, les médias, etc. ; l’encouragement adressé aux sociétés d’électricité à mesurer la portée réelle de l’importance des énergies renouvelables et à effectuer les changements de stratégie nécessaires à son développement.
Avez-vous une stratégie propre, vous les députés burkinabè membres du Parlement de la CEDEAO, afin que l’exécutif national s’approprie ces recommandations et les mette en œuvre ?
Notre Constitution en son article 84 prescrit que l’Assemblée nationale vote la loi, consent l’impôt et contrôle l’action du Gouvernement. Au regard du principe de séparation des pouvoirs, nous sommes tenus par cela en tant que parlementaires. Mais dans le rôle à nous attribué, l’Assemblée nationale à travers son règlement qui détermine les règles relatives à son organisation et à son fonctionnement, a nommé huit (8) commissions générales qui concourent au travail législatif et au contrôle de la mise en œuvre des politiques publiques. Parmi celles-ci, la Commission de l’évaluation des politiques publiques et du suivi de recommandations (CEPSUR) qui a vu le jour sous la 7èmeLégislature à l’initiative de Son Excellence le Président de l’Assemblée nationale, Alassane Bala SAKANDE, et au regard des attributions à elle confiées, occupe une place de choix dans la stratégie du Parlement pour que l’exécutif burkinabè se les approprie et les mette en œuvre.
L’Assemblée nationale peut aussi, conformément à son règlement engager une procédure d’information et de contrôle dans le cadre de ses rapports avec Gouvernement. Cette procédure est menée soit par des questions orales ou écrites, des questions d’actualité, des commissions d’enquête, ou des missions d’information.
Le Burkina importe de l’électricité de la Côte d’Ivoire et du Ghana. Pensez-vous que les conclusions de cette réunion délocalisée du Parlement de la CEDEAO puisse aider à améliorer cette coopération ?
Les conclusions de cette réunion délocalisée du Parlement régional à travers la quinzaine de recommandations formulées à l’attention des Etats membres dans le cadre communautaire va dans le sens d’améliorer cette coopération. Nous pensons en outre que les fortes relations bilatérales existant entre le Burkina Faso et ses voisins expliquent qu’il importe de l’électricité de la Côte d’Ivoire d’une part et du Ghana d’autre part.
Avez-vous quelque chose d’autre à dire sur cette réunion délocalisée ?
Cette réunion délocalisée, car se tenant hors du siège du Parlement qui est à Abuja au Nigeria, s’inscrit dans le cadre de l’exécution du programme d’activités de l’année 2021 du Parlement de la CEDEAO.
La Commission concernée par cette réunion est qualifiée de « Commission mixte » parce qu’elle regroupe pour l’occasion et en fonction du thème les membres des commissions générales concernées à savoir la Commission Énergie et Mines | Commission Industrie et Secteur privé | Commission Agriculture, Environnement et Ressources naturelles | Commission Infrastructure. En rappel, les commissions générales sont au nombre de quatorze (14) au niveau du Parlement de la CEDEAO.
Pour la présente réunion délocalisée tenue à Abidjan en République de Côte d’Ivoire, j’étais le seul parmi les six (6) parlementaires communautaires pour le compte du Burkina Faso
Tous mes vifs remerciements à Son Excellence le Président de l’Assemblée nationale, Alassane Bala SAKANDE pour la participation de la Représentation nationale et à vous aussi pour votre approche et tout ce que vous faites pour la couverture médiatique couvrant cette réunion en guise de redevabilité auprès de l’opinion publique.
Entretien réalisé par Zéphirin Kpoda