Procès sur l’assassinat de Thomas Sankara et autres: Blaise, Hyacinthe et Diendéré condamnés à la prison à vie
Le verdict du procès relatif à l’assassinat de Thomas Sankara et de ses 12 compagnons d’infortune est tombé ce mercredi 6 avril 2022 depuis la Salle des Banquets de Ouaga 2000. Les trois principaux accusés dans cette affaire, en l’occurrence Blaise Compaoré, yacinthe Kafando et Gilbert Diendéré sont tous reconnus coupables des infractions qui leur sont reprochés dans le coup d’Etat du 15 octobre 87 et écopent de ce fait d’un emprisonnement à vie. Considéré au départ comme la taupe ayant favorisé l’assassinat du père de la révolution et de ses camarades, Bossobè Traoré a été acquitté de même que les deux médecins militaires, mis en cause dans cette affaire à savoir Hamado Kafando et Alidou Diébré.
Comme on pouvait bien l’imaginer, la Salle des banquets de Ouaga 2000 a refoulé du monde aujourd’hui 6 avril 2022, comme ce fut le cas le 11 octobre de l’année dernière. Pas étonnant : cette journée ” historique” consacrait le délibéré du procès sur l’assassinat du président Sankara et de 12 de ses compagnons d’infortunes, à la faveur du coup d’Etat du 15 octobre 1987. L’émotion était au rendez-vous. Dès 8h, la Salle des Banquets reçoit ses premiers invités. A 10h passé de quelques minutes, la fameuse phrase à savoir : “A votre attention, la chambre” prononcée par le greffier en chef pour donner le top de départ de l’audience retentie. Pas de temps à perdre pour celui qui a assuré la police des débats plus de six mois durant dans cette affaire, le juge Urbain Méda. Aussitôt installé, il demande au chef de la garde de faire présenter les armes afin que la chambre de première instance du tribunal militaire puisse livrer ses réponses aux questions qui lui ont été posées. Passé cette étape, vient alors le moment pour la juridiction de donner sa décision. Un grand silence règne alors dans la salle et le public est toute ouïe . Le tribunal, par la voie de son président annonce Blaise Compaoré dit Jubal, Tousma Yacinthe Kafando et Gilbert Diéndéré coupables de la plupart des faits qui leur sont reprochés, et les condamne à l’emprisonnement à vie.
Albert Pascal Belemlilga et Djakalia Démé ont écopé chacun de cinq ans d’emprisonnement, assortis de sursis tandis que Tondé Ninda dit Pascal à qui mandat de dépôt a été décerné a pris trois ans ferme.
Tibo Ouédraogo et Jean Pierre Palm ont pris chacun dix ans ferme. Idrissa Sawadogo s’en tire avec un emprisonnement de 20 ans ferme de même que Nabonssouindé.
Pour leur part, les médecins militaires Alidou Diébré (ayant délivré le certificat de décès de Thomas Sankatra avec la mention mort naturelle) et Hamado Kafando (pour avoir délivré celui de Bonaventure Compaoré avec la mention mort accidentelle) ont été acquitté. S’il est considéré par bon nombre comme étant celui-là même qui a trahi le président Sankara, occasionnant ainsi son assassinant , Bossobè Traoré s’en tire à bon compte. à la surprise générale de l’assistance. En effet, le tribunal a prononcé l’acquittement en sa faveur. Ce qui est source de joie immense pour lui car cette liberté lui permettra de retourner dans son village et surtout de pouvoir s’occuper de ses 7 enfants et 29 petit-enfants.
Il faut noter qu’en plus des peines d’emprisonnement, la chambre a prononcé à l’encontre de tous les accusés condamnés, la déchéance de toutes les distinctions honorifiques dont ils auraient bénéficié.
Verdict sous forme de satisfaction et de colère
” La peine est excessive. Ce n’est pas juste pour mon client d’autant plus qu’il est resté pour s’expliquer”. C’est ce que dira Me Mathieu Somé , un des conseils du Général Gilbert Diendéré, après avoir relevé que le verdict permettra au peuple burkinabè de se reconcilier avec lui-même et pouvoir former une union sacrée autour de nos autorités afin de résoudre les questions essentielles : celles de l’insécurité. Interrogé sur la possibilité d’interjeter appel , l’avocat a expliqué que son mandat s’arrête là, mais si son client le renouvelle dans le sens de faire appel, ils s’engageront pour ce fait.
La veuve du président Sankara, Mariam Sankara, s’est voulu brève en déclarant :”La chambre a livré son verdict. On a demandé la justice . Le juge a fait ce qu’il avait à faire. Ce verdict va donner à réfléchir à beaucoup de personnes”.
Cet avis est partagé par Me Prosper Farama, un des avocats des parties civiles, pour qui aujourd’hui est un jour historique à partir duquel le deuil des familles des victimes commencera véritablement. Avec ce verdict qui “est conforme aux débats qui a eu lieu durant six mois”, il dit fonder l’espoir qu’un tel acte de barbarie ne se produise plus dans notre pays ni ailleurs en Afrique. Si Me Farama se rejoint du contenu du verdict, les choses ne sont pas finies pour autant dans cette affaire selon lui car il y a dit-il, le volet international qui reste à être élucidé. Et toujours relativement à ce procès, l’audience reprendra le 13 avril avec la plaidoirie des avocats des parties civiles pour les intérêts civils.
Roukiétou Soma