Impact de l’orpaillage : « Si un village est victime des poussières, de la pollution des eaux et de la déforestation, il risque de ne pas survivre »
Intervenant dans le « programme population » lancé en 2018, l’Institut supérieur des sciences de la population (ISSP) de l’université Joseph Ki-Zerbo travaille dans le volet « renforcement des capacités, production et diffusion des connaissances sur la population burkinabè ». Elle s’est ainsi engagée à, entre autres, réaliser 11 projets de recherche. Les résultats de cinq de ces études ont été présentés le jeudi 30 juin 2022 à Ouagadougou à l’occasion d’un atelier.
Ces différentes enquêtes sont formulées comme suit : « Tendance de la mortalité et évolution des causes de décès au Burkina Faso », « jeunesse, migration et développement, quelles stratégies pour optimaliser l’apport des migrants au développement au Burkina Faso », « impacts sociodémographiques de l’activité minière au Burkina Faso », « accès des adolescents aux services de santé de la reproduction au Burkina Faso : obstacles et opportunités » et enfin « accès à l’éducation : les parcours scolaires et le devenir des sortants du système éducatif au Burkina Faso (cas de Ouagadougou) ».
Pour chaque recherche, l’équipe qui s’en est chargé a eu près d’une heure de temps pour présenter les résultats avant de prendre les questions, les recommandations et les suggestions du public composé de représentants de plusieurs organismes.
L’un des sujets qui a le plus retenu notre attention est sans conteste celui qui touche à l’orpaillage et qui a été présenté par le Dr Gabriel Sangli. Menée entre mars et avril 2020, cette étude devait toucher l’ensemble du pays. Cependant, à cause de l’insécurité, seulement huit régions ont été prises en compte. Un certain nombre de sites d’orpaillage ont été identifiés et à travers un échantillonnage, l’équipe a essayé de voir, dans un rayon de cinq kilomètres, comment les populations qui habitent en ces lieux ont évolué avec l’activité minière.
Selon le Dr Sangli, les résultats ont permis d’analyser plusieurs dimensions. « Nous voyons notamment qu’une partie de la population qui, en saison morte faisait autre chose, a commencé à pratiquer l’orpaillage. On a aussi vu que la population est différemment impliquée. », a-t-il expliqué, précisant que les hommes n’ont pas le même niveau d’implication que les femmes et les enfants. En effet, la gent féminine aurait des activités plus spécifiques à elle comme le vannage ou le lavage. Quant aux enfants, certains y sont présents malgré eux parce qu’ils y ont été envoyés par les parents. Il y a aussi des bambins qui quittent l’école pour aller chercher de l’or parce qu’ils ont des camarades qui le font et qui gagnent ainsi de l’argent. « Le travail dangereux pour les enfants est défendu. Nous avons donc voulu faire un état des lieux pour montrer qu’il y a problème et formuler des recommandations à l’endroit des décideurs », a indiqué le responsable de projet qui estime que l’extraction minière n’est bien que lorsqu’elle est bien gérée, permettant de concilier le gain qu’elle génère et la protection des communautés qui doivent vivre de cela.
Pour le Dr Sangli, il est difficile de dissocier l’avantage individuel de l’avantage collectif. « Quand on a tout un village qui est victime des poussières, de la pollution des eaux et de la déforestation, il risque de ne pas survivre. Certains sont malades, ils en sont conscients mais finissent par dire qu’ils n’ont pas d’alternative », a-t-il déclaré avant de poursuivre : Il y a des textes qui existent pour encadrer cette activité. Mais, dans l’application, il y a des difficultés. Donc nous rappelons tout cela dans les recommandations adressées aux autorités centrales, locales, aux propriétaires de mines, à la communauté et à la recherche ».
En rappel, le programme est réalisé en partenariat avec l’Union européenne. Les résultats des six autres études seront présentés d’ici la fin de l’année 2022.
Zalissa Soré