Plateforme de trading 5M : déboussolés, des arnaqués s’en remettent aux autorités
Ils sont des milliers à avoir investi plusieurs millions, voire des milliards de F CFA dans la plateforme de trading 5M. Tout marchait jusqu’au 4 août dernier date à partir de laquelle la plateforme est devenue inaccessible, y compris les comptes d’investissements des clients, pour cause de maintenance, disent les administrateurs. Mais des milliers de personnes se considèrent depuis lors comme des victimes d’une « arnaque préméditée ». C’est en cette qualité que certains d’entre eux ont convié les journalistes ce vendredi 18 août 2023 à Ouagadougou pour, non seulement prendre l’opinion à témoin, mais aussi pour demander le secours des autorités compétentes afin de recouvrer leurs investissements.
C’est sans doute l’une des plus grosses arnaques de l’histoire des investissements en ligne au Burkina Faso. Les victimes ? Des centaines, voire des milliers de personnes représentant presque toutes les couches de la société. L’arnaqueur ? La plateforme 5M. Depuis début août, des investisseurs ne sont plus en mesure de disposer de leurs fonds investis sur cette plateforme qui avait démaré ses activités au pays des Hommes intègres 5 mois plus tôt. Client de la plateforme, Yves Nébié, par exemple, a misé la somme de 120 000 F CFA et n’a pu retirer que 15 000F avant que son investissement ne tombe à l’eau. Au total, pas moins de 11 milliards de F CFA ne sont plus accessibles à ces nombreux investisseurs.
Comment en est-on arrivé là ? Pour répondre à cette question, Sylas Bagré, l’un des animateurs de la conférence de presse, a trouvé nécessaire de dérouler l’historique et le fonctionnement de 5M. Cette structure de trading quantitatif, dit-il, est une plateforme d’investissement qui se dit avoir son siège mondial aux Etats-Unis. Elle a été fondée en 2013 par un certain Matt E. Mure et l’actuel premier responsable de la plateforme se fait appeler M. Houston. La responsable Afrique, elle, se nommerait Mme Helena. Pas de document d’existence officielle au Burkina, mais les investisseurs ont été convaincus d’une bonne affaire après être rassurés par Mme Helena de la légalité de 5M au pays des Hommes intègres. Mieux encore, des dons aux personnes déplacées internes ont été faits au nom de la structure qui promettait également de construire des infrastructures sociales.
L’adhésion à la structure, toujours selon Sylas Bagré, se fait par l’achat d’un robot et le dépôt d’une caution. Après quoi, une tâche doit être accomplie quotidiennement sur la plateforme par l’investisseur, moyennant un revenu fixe en fonction du robot choisi. A compter de la date d’adhésion, la durée de vie du robot est d’une année, selon Sylas Bagré qui cite les responsables de la plateforme. Cette plateforme est d’un système en partie pyramidale. Théoriquement, « quand on fait intégrer un adhérent, on devient un opérateur. Celui-ci a droit à des ristournes de 3 dollars sur chaque adhésion et 300 dollars à chaque fin de mois », confie Sylas Bagré.
Selon les conférenciers, le flou a commencé à s’installer le 4 août. « Prétextant une mise à jour de 72 heures afin de relier le service à Orange money et Moov money, pour faciliter les retraits, la plateforme s’arrêta à notre grande surprise », a expliqué Sylas Bagré. Et d’ajouter : « 5M n’a donc pas tenu ses engagements vis à-à-vis de ses employés. Sur ce, nous dénonçons une arnaque préméditée et invitons les autorités compétentes à se saisir de cette affaire ». Si les mécontents en appellent à leur « protection » de la part de l’autorité, c’est parce que « nombre d’entre les victimes se sont endettés et se retrouvent dépouillés de tout. Mieux, lors de l’adhésion, la carte d’identité des souscripteurs est demandée et de même les contacts téléphoniques et les références de compte mobile money. D’où la crainte de l’usage de ces données à d’autres fins », explique Sylas Bagré. Les arnaqués comptent saisir notamment le Médiateur du Faso, les ministères de la Sécurité et de l’Economie numérique. Les arnaqués espèrent que cette saisine permettra de traquer leurs bourreaux mais aussi et surtout de recouvrer leurs investissements.
Pour rappel, ce n’est pas la première fois que des investisseurs en ligne se disent victimes d’une arnaque de telle envergure. En effet, plusieurs milliers de Burkinabè ayant investi dans le Forex sont, depuis 4 ans, dans la vaine attente d’environ 20 milliards de F CFA. Ce statut quo avait valu, en avril dernier une question orale d’un député à l’Assemblée législative de transition (ALT).
Bernard Kaboré