Journée mondiale de la liberté de presse : “Notre métier ce n’est donc pas de blesser ou de faire mal, mais il s’agit de pointer le mal et ainsi contribuer à sa guérison”
Ceci est un message du Centre national de presse Norbert à l’occasion de la Commémoration de la Journée mondiale de la liberté de presseOuagadougou, le 03 mai 2024.
Mesdames, messieurs,
Distingués invités
Chers journalistes, consœurs, confrères,
En ce 31ème anniversaire de la journée mondiale de la liberté de la presse, je voudrais au nom du comité de pilotage du Centre national de presse, vous souhaiter la bienvenue dans cette salle Henry Sebgo, du nom de plume de notre célèbre confrère, martyr de la vérité, martyr du droit à l’information, j’ai nommé Norbert Zongo.
Nous sommes honorés d’accueillir autant de personnalités et de monde, surtout dans ce contexte d’assauts tous azimuts et répétés contre la liberté d’expression et de la presse, contre la liberté, tout court. Votre présence ici, pour certains est déjà un signe de témérité, tant il ne fait pas bien par ces temps qui courent d’être vu en compagnie des journalistes, qui osent encore rêver d’indépendance, d’esprit critique. Vous êtes ici, endroit par excellence de la liberté d’opinion, de la libre expression, ouvert bien sûr aux défenseurs des libertés mais même à nos plus grands contradicteurs. Le Centre de presse continue de faire sienne la célèbre phrase de l’écrivaine Britannique Evelyne Béatrice Hall « « Je ne suis pas d’accord avec ce que vous dites, mais je me battrai jusqu’au bout pour que vous puissiez le dire ».
Mesdames/Messieurs
C’est en 1993 que la journée mondiale de la liberté de la presse a été officiellement adoptée par l’Assemblée Générale des Nations Unies, et cela eu égard à la contribution inestimable des médias au développement de l’humanité au plan politique, socioéconomique, culturel et aussi en vue de protéger les travailleurs des médias. C’est une occasion, pour informer et sensibiliser les citoyens sur les atteintes portées à la liberté d’expression et de la presse. En effet, dans plusieurs pays les publications de presse sont censurées, suspendues ou interdites de paraitre. Au même moment des journalistes, des directeurs de publication, des rédacteurs en chef et des éditeurs sont harcelés. Ils subissent des menaces, des exils forcés et des pressions de tout genre. La presse burkinabè et les journalistes n’échappent pas à cette situation. Dans d’autres contrées les confrères en Afrique et dans le monde sont attaqués, détenus et même tués.
Le 3 Mai est avant tout une date pour encourager et développer des initiatives en faveur de la défense et de la promotion de la liberté de la presse et en faire un état des lieux à travers le monde.
Mesdames/MessieursChers consœurs/ Chers confrères
Au moment où nous commémorons cette journée combien symbolique, une vague de suspension s’abat sur les médias. Les dernières en date sont celles de la Voix de l’Amérique (VOA), de la BBC, de TV5 Monde et les sites d’informations de la Deutsch Welle, Ouest France, le Monde, APA news, The Gardian, Agence Ecofin.
On se souvient encore qu’avant cette liste, d’autres médias comme RFI, France24, Libération, le Monde, et j’en oublie (Oméga média ayant été lui aussi victime temporairement), ont été suspendus par le gouvernement de Transition.
En refaisant la loi sur le CSC pour la tailler sur mesure, le Gouvernement n’avait pas fait de mystère sur ses intentions. Il s’agissait pour les autorités burkinabè de faire faire au collège des conseillers ce qu’elles souhaitent exactement. Ce n’est donc pas étonnant que les pertinentes propositions d’amendements apportées par les Organisation professionnelles des médias et même par le COTEVAL, instance technique de validation des avant projets de lois, n’aient pas trouvé d’oreille attentive du côté du Gouvernement. Les députés de l’Assemblée législative de Transition ont tenté à leur manière, par des supplications de sauver l’indépendance du CSC mais ils ont dû se soumettre à la volonté de l’Exécutif.
C’est dire donc que la loi portant attribution, composition, organisation, fonctionnement du CSC est inopportune, inopérante, décadente et hautement pathogène pour les médias, la démocratie, la vérité et la liberté. Elle symbolise tout le mépris du pouvoir du MPSR2 pour les médias et leurs animateurs.
Distingués invités, chères consœurs/ chers confrères
Sous le MPSR2, les médias et leurs animateurs sont menacés et insultés au quotidien. Les actes attentatoires de leurs institutions à la liberté sont prolongés par leurs soutiens. Ils s’épandent en invectives et menaces insidieuses contre les journalistes et les médias sur les réseaux sociaux, sur les antennes et plateaux de radio et de télévision, dans les meetings et autres manifestations publics qu’eux seuls sont autorisés à tenir, tandis que la moindre réunion de partis politiques ou d’organisation de la société civile est interdite en vertu d’un communiqué N°3 du MPSR2 que les exécutants municipaux se plaisent à rappeler Certains s’arrogent même le droit de vouloir fixer l’agenda des médias et récemment la télévision BF1, elle qui a osé aborder le thème des élections et la fin de la transition a essuyé le courroux des nouveaux maitres de la pensée unique.
Des journalistes, des défenseurs des droits humains et bien de citoyens sont poussés à l’exil.
Chères consœurs/ Chers confrères
Toutes les officines du pouvoir ne veulent voir en vous que les relais serviles de leurs communiqués et pensées. Est-ce vraiment cela la mission d’un journaliste fut-il en période de guerre ? Evidemment que non. « Notre métier n’est pas de faire plaisir, non plus de faire du tort, il est de porter la plume dans la plaie » disait le Grand reporter français Albert LONDRES. L’esprit de cette pensée qui caractérise notre métier est valable partout ou l’on se trouve. Cette pensée est valable que l’on soit dans une situation de paix ou de guerre et elle devient même indispensable dans les situations de crise justement. Notre métier ce n’est donc pas de blesser ou de faire mal, mais il s’agit de pointer le mal et ainsi contribuer à sa guérison.
Chères consœurs/ Chers confrères
Nous avons voulu mettre au centre de ce 31ème anniversaire de la liberté de la presse, le rôle du journaliste en période de guerre. Ce thème nous est pratiquement imposé par l’actualité nationale au regard des assauts répétés, en termes de violations de liberté contre des journalistes, mais aussi au regard de la floraison des spécialistes en tout genre qui théorisent à longueur de journée sur le rôle du journaliste. Le panel qui va donc avoir lieu tout à l’heure sur « Quel rôle pour le journaliste en situation de guerre ? » permettra de poser le débat avec tous les participants que vous êtes afin de dégager des pistes pertinentes et consensuelles sur ce qui peut être les lignes directrices de notre métier et comment nous pouvons contribuer utilement et efficacement à la résolution de la crise actuelle et singulièrement au retour de la sécurité et de la paix dans notre pays. Je salue à l’avance les panélistes qui ont accepté de venir contribuer au débat car encore une fois de plus il n’est pas toujours évident dans ce contexte de trouver des personnes ressources qui acceptent toujours de débattre publiquement. A vous cher public, aux personnalités ici présentes, je vous invite également à la réflexion avec nous. Au plan international, l’UNESCO a défini comme thème cette année, « la presse au service de la planète, le journalisme face à la crise environnementale ». Et ce en reconnaissance du rôle crucial des médias et du journaliste dans la sensibilisation, la compréhension et la mobilisation autour des enjeux liés à la crise environnementale mondiale
.Mesdames/MessieursChères consœurs/ Chers confrères
En plus de la cérémonie commémorative, du panel, du lancement du rapport sur l’état de la liberté de la presse au Burkina Faso et du prix Marie « Soleil frère » de la meilleure journaliste, cette journée sera aussi marquée par le traditionnel tournoi de football. Cette année, le tournoi met au prise six (06) équipes, dont deux des médias, deux des forces de défense et de sécurité, l’équipe des Nations Unies et celle de Globex Construction.Rendez-vous donc à 16h sur le terrain de Siguian Arena de Ouaga 2000 près du Mémorial aux héros nationaux pour vivre une belle compétition. Je souhaite bonne chance à toutes les équipes mais plus particulièrement à celles de la presse qui doivent commencer à faire leur remontada sur les équipes des FDS qui ne nous raflent les trophées sans concession
. Mesdames/MessieursChères consœurs/ Chers confrères
Au moment de clore mon propos, je voudrais adresser mes sincèrement remerciements à l’Ambassade Royal du Danemark pour son soutien constant au Centre National de presse NORBERT ZONGO (CNP-NZ).Je voudrais associer à ces remerciements, le Haut-Commissaire des Nations Unies pour les droits de l’homme qui nous accompagne pour cette 31ème journée mondiale de la liberté de la presse.
Merci d’avoir contribué à donner de l’ampleur à cette tribune du 3 Mai.A toutes celles et à tous ceux qui se battent pour la liberté d’expression et de la presse au péril de leur propre liberté, nous disons que cette tribune est avant tout, la vôtre.Le Centre national de presse, par ma voix vous témoigne toute sa reconnaissance pour votre constante mobilisation. Ce n’est pas le moment de baisser les bras, mais de persévérer.
Nous exprimons notre solidarité au groupe Savane média fermé pour impôts. Nous exhortons les Burkinabè à soutenir leurs médias dans un élan de mécénat. Nous lançons un appel aux autorités ici présentes ou à leurs représentants à prendre conscience de ce que la liberté vaut la peine d’être défendue.
Nous les exhortons à œuvrer pour l’effectivité de la liberté et l’Etat de droit. Nous leur souhaitons et à nous tous un succès dans la reconquête de l’intégrité de notre territoire pour le retour de la paix au Faso.
Vive le Burkina Faso paisible et prospère
Vive la liberté d’expression et de la presse,
Nan Lara An Sara
Reporters sans frontières / Reporters Without Borders / RSF
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