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Réunion commission mixte du Parlement de la CEDEAO : Quand les réalités aux frontières contredisent les Protocoles d’intégration régionale

Au 3e jour de sa réunion délocalisée sur le « rôle du Parlement dans la mise en œuvre du Protocole sur la Libre circulation des personnes le Droit de résidence et d’établissement dans la région de la CEDEAO », la commission mixte Commerce, Douanes et libre circulation, Affaires sociales, genre, promotion de la femme et des personnes en situation de handicap, Affaires juridiques et droits de l’homme, Affaires politiques, paix, sécurité et mécanisme africain d’évaluation par les pairs, a eu une séance interactive à Karang- Amdalai, une ville à la frontière de la Gambie et du Sénégal, le mercredi 28 août.


Ce déplacement hors de Banjul où a lieu la réunion de la commission mixte, s’inscrit dans la dynamique de rompre avec l’habitude des institutions de la CEDEAO à prendre des décisions dans le confort des bureaux climatisés des grandes villes pour s’orienter davantage vers l’écoute des populations à la base. Après donc la rencontre avec les acteurs du commerce, les professionnels du tourisme et des migrants résidant à Banjul, les députés communautaires voulaient toucher du doigt les réalités vécues aux frontières des pays membres avec cette séance interactive à Karang- Amdalai.


Le mercredi 28 août, la commission mixte, accompagnée du staff de l’administration parlementaire et de journalistes invités à cette réunion délocalisée ont traversé le fleuve Gambie pour se retrouver à la frontière du Sénégal où les attentaient les premiers responsables des douanes, de la gendarmerie, de la police, des gardes côtes, des services de santé et de l’immigration en poste à Karang- Amdalai. La séance de travail à consister à s’informer auprès de ces autorités chargées de gérer la circulation des migrants, des commerçants et de leurs marchandises des difficultés rencontrées et leur transmettre en retour les griefs que ces derniers expriment à leur encontre.

Des responsables des gardes côtes, de la douane et de la santé gambiens venus à la rencontre


Une bonne vingtaine de responsables gambiens et sénégalais des douanes, de la gendarmerie, de la police et de la santé ont participé à cette rencontre informelle qui ne manquait pas d’intérêt, bien au contraire. Elle a mis à nu les nombreux défis à relever pour faciliter davantage la Libre circulation des personnes et des biens ; le Droit de résidence et d’établissement dans la Communauté.
Pourtant, avant que les échanges ne crèvent l’abcès de ces problèmes réels, des responsables de la sécurité aux frontières, particulièrement côté sénégalais, ont fait dans la langue de bois. En effet, préférant botter en touche des entraves à la mise en œuvre des Protocoles concernés, ils ont indexé la bonne collaboration entre eux et leurs collègues gambiens, le manque d’incidents dans le trafic entre les 2 pays pour affirmer que si cet exemple de la frontière Karang-Amdalai pouvaient être projeté sur d’autres frontières de l’espace CEDEAO, c’est que la Libre circulation des personnes et des biens était un succès régional. Cette exemplarité de la collaboration entre autorités frontalières à Karang-Amdalai a été corroborée par la partie gambienne qui n’a vu que des soucis mineurs liés au long délai dont sont victimes certains commerçants du secteur informel pour déclarer leurs marchandises à la douane.
Ce n’est qu’un problème parmi beaucoup d’autres, ont retorqué les parlementaires présents qui ont alors étalés aux yeux des douaniers, des gendarmes et policiers les nombreux griefs recueillis la veille auprès des commerçants , de migrants ou constater par des députés eux-mêmes lors de leurs voyages : Taxes indues perçues sans reçus dont sont surtout victimes les femmes commerçantes ; Contrôles multiples avant et après la frontière ; surestimation ou sous-estimation du poids ou de la valeur des marchandises à déclarer ; fluctuation à la hausse inexpliquée des barèmes de taxation ; mauvaises manières de servir des agents aux postes frontières, etc.

Des responsables de la gendarmerie et police sénégalaise à l’écoute des députés.


Mais ces derniers ont battus en prêche ces reproches mettant en avant l’ignorance de certains acteurs économiques, notamment les commerçants occasionnels, sur les dispositions des Protocoles de la CEDEAO ; les lois nationales qui contredisent ces Protocoles ; leurs insuffisances sur des particularités comme par exemple les mineurs en voyages, le transport mortuaire et surtout le nouveau contexte sécuritaire que vit la région ; les procédures douanières non maîtrisées ; les mauvaises humeurs personnelles de certains agents lié à leur travail stressant à ne pas généraliser.
Des problèmes réels existent donc qu’il faut travailler à résoudre d’où les propositions suivantes :

  • Enclencher le mécanisme de révision de ces importants Protocoles à la lumière des nouvelles réalités économiques, politiques, sociales et sécuritaires ;
  • Au-delà des séances interactives initiées à Banjul par la commission mixte, que la CEDEAO trouve un moyen neutre de faire une idée plus exhaustive de la mise en œuvre des 2 Protocoles en identifiant des frontières sensibles ;
  • Intensifier le mécanisme d’information- sensibilisation- plaidoyer auprès des acteurs économique, notamment du secteur informel, des agents aux postes frontières pour une meilleure compréhension et application des Protocoles en question.
    Elles ont été faites pendant la séance alternative pour faciliter la mise en œuvre des Protocoles sur la Libre circulation, le droit d’établissement et de résidence, pierre angulaire de l’objectif stratégique de construire une CEDEAO des peuples :

En conclusion, bien que durant cette séance interactive le ton est monté des fois du côté des parlementaires pour stigmatiser la langue de bois de certains douaniers, policiers ou gardes côtes, et du côté de ces derniers pour rejeter le son de cloche ‘’subjectif’’ des commerçants et voyageurs qu’ont leur oppose, les échanges se sont achevés dans une ambiance de bonne courtoisie. Pour sûr, cette séance interactive va peser sur les recommandations que fera la commission mixte au Parlement et à la Commission de la CEDEAO pour décision des chefs d’Etats et de gouvernement afin que les réalités aux frontières ne contredisent plus l’idéal d’une région ouest-africaine intégrée, prospère et en paix.
Ce jeudi 29 août, les séances interactives avec les populations se poursuivent par une rencontre d’échanges directs avec les jeunes de la Gambie sur la migration dans l’espace CEDEAO. Nous y reviendrons.

Zéphirin Kpoda

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