Village artisanal de Ouaga : « Nous payons des gens qui ne sont pas à la hauteur », Inoussa Dao, président des artisans
Les travailleurs du Village artisanal de Ouagadougou ont exposé au cours d’une conférence de presse, le 10 septembre 2020, les difficultés qu’ils vivent. Pour eux, cela est dû au manque de vision de leur administration.
Selon les artisans, la léthargie dans leurs activités perdure depuis 2015. A l’époque, le bureau des artisans qui venait d’être mis en place, avait aussitôt dénoncé les dysfonctionnements dans la vie du Village, mais rien n’y fit. « On a multiplié des rencontres mais c’est avec un cœur meurtri que l’on se retrouve ici pour la énième fois. Notre structure est confrontée à un manque de vision. Sur les papiers le village artisanal n’existe pas. Il n’y a aucun statut juridique. Qu’est ce qui explique ce souci ? », a interrogé le président des artisans, Inoussa Dao.
Pour certains artisans avec la morosité du marché, la menace terroriste, la Covid-19, les commandes sont rares et ne leur permettent plus d’honorer les frais de location. « Les impayés s’élèvent à 40 millions, frais d’électricité et loyers des boutiques compris. Avec une bonne visibilité, en un mois on peut éponger ces dettes », a précisé M. Dao.
On n’est pas écouté !
A en croire le principal orateur lors de cette conférence de presse, Inoussa Dao, leurs nombreuses propositions ne sont pas prises en compte et aucune initiative n’est prise dans le sens de les rendre visible. « Il n’existe même pas de page Facebook officielle, même pas un site Web. Nous payons des gens qui ne font pas leur boulot et pire, qui ne veulent pas écouter nos suggestions. Voilà pourquoi on est arrivé à cette situation. Pourquoi ne pas explorer des pistes pour créer ou trouver des foires en collaboration avec l’APEX ? »
Les artisans, selon les explications des conférenciers, ne profitent pas de la labélisation du faso danfani. Pourtant elle offre des opportunités à saisir. Comment en profiter, quelle approche le village a fait pour obtenir le marché de la production de masque de protection contre la covid-19 ? On peut par exemple, dans le cadre de la commémoration du 8 mars obtenir des parts de marchés pour les tisseuses de la structure.
« Nous travaillons sans électricité depuis juillet 2020 »
Après la conférence de presse des artisans, nous avons entrepris des démarches afin d’obtenir le son de cloche de l’administration du Village. D’entrée de jeu, le gestionnaire du Village, Maurice Sama, a exprimé son mécontentement parce que les artisans ne l’on pas informé de la tenue de leur conférence de presse. Selon lui, «les ouvriers ont la chance d’appartenir à une structure bien organisée. L’écoulement des produits est lié aux moyens dont dispose l’administration pour les accompagner. En 2013, nous avons participé à la foire de la CEDEAO à Accra où 75 % des frais ont été casqués par l’administration », a-t-il dit. Il a expliqué que les artisans doivent payer les loyers, en reversant la majoration de 10% sur leurs ventes. « Nous comptons aussi sur le guichet automatique, le salon de coiffure. C’est de là que proviennent les ressources du Village artisanal. Ce n’est pas une structure qui attend des fonds de l’Etat elle doit s’autofinancer. La part de l’Etat vient en appui », a-t-il soutenu.
M. Sama, toujours en matière de recettes a fait remarquer que de 520 millions 417 090 FCFA de vente en 2014, le Village est passé à 261 millions 63 825 F CFA en 2019. “Vous voyez la baisse ? On a versé 231 801 940 F aux artisans pendant que l’administration prélevait 59 millions 391 885 F. Sur ce montant, 30 millions 130 000 F de frais de loyer n’ont pas été reversé. Avec quoi nous allons travailler, à fortiori accompagner les artisans. Nous avons une société de gardiennage, une autre de nettoyage qu’il faut payer, sans oublier les autres partenaires. Comment être en règle si de l’autre côté certains ne jouent pas leurs partitions“, a détaillé M. Sama.
Interrogé sur les mesures d’accompagnement des artisans en périodes de crise le directeur du centre s’est expliqué en ces termes: ” Dans le contexte de la pandémie, j’ai adressé des lettres un peu partout et seul le Grand-duché du Luxembourg a répondu favorablement. Il a pris en charge les loyers d’avril, mai et juin. Il ne nous restait plus que la facture d’électricité à payer (1.000 000 F CFA). Les artisans ont contribué à hauteur de 300 000 F CFA et nous on devait payer le reste. Comment le faire si on ne nous reverse pas les commissions sur les ventes ? Nous sommes sans lumière depuis juillet 2020.“
W. Harold Alex Kaboré