Société

Album « Bats-toi » : L’histoire d’un jeune homme brisé par un fil électrique mal raccommodé

Electrocuté à l’âge de deux ans par un fil électrique mal raccommodé, Marius de Jésus, de son vrai nom Ragnangnéwendé Marius Zongo, a toujours refusé de baisser les bras. Un état d’esprit qui lui a permis, après huit ans de dur labeur, de mettre sur le marché du disque son premier album intitulé « Bats-toi ». Au cours de la soirée de dédicace qui a eu lieu le vendredi 27 novembre 2020 à Ouagadougou, le jeune homme n’a pas manqué de revenir sur son parcours aussi bouleversant que vivifiant.

« Difficile n’est pas impossible grâce à Dieu », telle est la devise de Marius de Jésus

A sa naissance du côté de la lagune Ebrié, rien ne laissait présager que Marius passerait sa vie dans un fauteuil roulant. Malheureusement, le sort lui a réservé un autre destin. Parti dans la maison voisine pour jouer avec un autre enfant de son âge, le bout de choux sera électrocuté à cause d’un fil électrique mal raccommodé. « Ils avaient branché un poste récepteur dont le câble était coupé. Dans les mouvements, ma main est entrée en contact avec la partie du fil qui était mal raccommodée avec du ruban adhésif. J’ai été secoué par le courant et il a fallu sauter le compteur pour me libérer », nous a confié le jeune homme. Emmené d’urgence dans un centre médical, Marius ne présentait pourtant pas de problème apparent. Ce n’est que par la suite que les déformations ont commencé à se manifester.

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Le petit enfant ne connaîtra donc jamais la joie d’aller à l’école. C’est grâce à la catéchèse qu’il se fera une idée de l’ambiance des salles de classe. Il aura également la chance d’apprendre à lire grâce aux maîtres de maison qui lui dispensaient des cours à domicile. Avec l’appui de la mission catholique en Côte-d’Ivoire, Marius bénéficie de séances de rééducation qui réussissent à redresser ses membres restés pliés à cause du handicap causé par l’électrocution. « On m’avait mis des appareils orthopédiques et à l’aide des béquilles, j’arrivais à marcher. Mais en grandissant, c’était devenu difficile de m’appareiller. J’ai néanmoins poursuivi les exercices de maintien », a-t-il expliqué, ne comprenant toujours pas pourquoi il ne peut plus porter ses supports qui l’aidaient à se déplacer.

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C’est en 2005 que Marius rentre au Burkina avec sa famille. Il décide alors de se consacrer à la musique, toujours avec le soutien de la mission catholique et d’une autre fondation. Il collabore avec plusieurs arrangeurs et fait des featuring avec certains artistes. Le maxi qu’il vient de réaliser lui aura pris huit ans de travail, entre désillusions et promesses non tenues. En somme, cet album intitulé « bats-toi » est le fruit de ses expériences. Autant de difficultés qui l’amènent à une seule conclusion : « Dans la vie, il faut se battre et ne pas tout espérer des autres car ils ne seront pas toujours présents ».

Le premier titre (peut-être) est un dialogue avec sa validité

Mais pour ce qui est de la soirée de dédicace, famille, amis, collègues et autres personnes de bonne volonté ont fait le déplacement pour soutenir l’artiste en herbe ému par autant de bienveillance. Certains ont même acheté son CD à 10 000 alors qu’il ne coûte que 2 000 F CFA. Marius Zongo espère que le produit, composé de trois titres plus un remix, sera apprécié et suffisamment consommé pour lui permettre de se former davantage dans le domaine de la musique et de remédier à ses problèmes de déplacement, l’une de ses principales difficultés. « Pour être en face de vous, il a fallu quelqu’un pour me pousser. J’ai toujours quelqu’un dans le dos sans compter qu’à Ouagadougou les taxis ne passent pas partout », a indiqué celui dont la devise est  « difficile n’est pas impossible grâce à Dieu. »

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Contrairement à ce que laisse entendre son pseudonyme, Marius de Jésus ne fait pas de la musique religieuse, lui qui est né dans une famille chrétienne catholique. Il refuse également d’être vu comme une personne invalide. « Je suis capable de faire bien plus que ce que vous pouvez imaginer. Ecoutez-moi avant de me juger », dit-il à l’adresse de tous ceux qui pensent qu’handicap physique rime avec incapacité de se prendre en charge.

Zalissa Soré

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