Mariage d’enfants : « Ce n’est pas une pratique musulmane mais traditionnelle », selon le Cheikh Mahamadi Tao
Le mariage d’enfants est-il, à votre avis, un phénomène culturel, traditionnel ou religieux ? Pour le Cheikh Mahamadi Tao, théologien de formation, la question ne se pose pas : « Le mariage d’enfants, tout comme les violences faites aux femmes, existait bien avant l’avènement de l’islam ».
Le président de la commission de la réconciliation à la Fédération des associations islamiques du Burkina (FAIB), tout comme d’autres membres de ladite structure, a été formé à la thématique du mariage d’enfants en Egypte, puis en Mauritanie. Depuis son retour, il a décidé d’aller sur le terrain pour mener la sensibilisation. En 2005, il se lance dans la lutte pour la planification familiale et pour l’abandon de l’excision. Ça ne fait que trois ans que le Cheikh Mahamadi Tao travaille aux côtés d’associations comme Voix de femmes, facilitant ainsi leur approche auprès des religieux et auprès des leaders d’opinion.
Présent aux deux jours (du 8 au 9 décembre 2020) d’atelier organisé par le Réseau des journalistes et communicateurs pour la promotion de l’abandon du mariage d’enfants, il s’est évertué à démontrer que ce sont les pratiques traditionnelles et culturelles qui influencent la religion musulmane. Le fondateur du complexe scolaire La Sagesse s’appuie pour cela sur des passages du Coran. Pour lui, une fille, une future maman, ne saura gérer son foyer que si elle est vraiment épanouie et heureuse. « Si elle est mûre avant le mariage, elle pourra bien éduquer les enfants, bien s’occuper de son mari et la société ne s’en portera que mieux », a expliqué le spécialiste des textes sacrés, ajoutant : «Quand on marie un enfant qui n’a aucune expérience de la vie, on l’expose à des maladies mortelles pendant la grossesse ou lors de l’accouchement. Nous devons combattre cela ».
Cheikh Mahamadi Tao sur le mariage d’enfants
De ce que nous avons compris, le Coran fait cas de la maturité, notamment dans la partie concernant les orphelins (sourate 4 verset 6). C’est d’ailleurs sur ces points que le check se base pour dire qu’une fille ne doit pas être mariée avant l’âge de 18 ans. Aussi, il faut demander le consentement de l’intéressée avant de célébrer les noces, comme ce fut le cas du prophète Mohammed lorsqu’il a voulu marier sa fille. « Quand les deux premiers prétendants sont allés demander sa main, elle a refusé. Ce n’est qu’au troisième candidat qu’elle a accepté de se marier », a expliqué le théologien. A l’en croire, on devrait même envoyer la fille à la mosquée pour la célébration. Elle peut également donner une procuration écrite ou orale pour dire qu’elle est d’accord pour cette union.
En rappel, le Réseau des journalistes et communicateurs pour la promotion de l’abandon du mariage d’enfants est né d’une série de plaidoyers menés par le Groupe d’action, de lobbying et de plaidoyer (GALOP) présidé par l’épouse du chef de l’Etat, Sika Kaboré, auprès d’une cinquantaine de journalistes. C’était en août et en octobre 2020, respectivement à Ouagadougou et à Ziniaré.
Zalissa Soré