Société

Fin d’année à Ouaga : être couturier en temps de fêtes

 « Il a pris mon tissu et me fait tourner en rond… » ; « Ce couturier ne me verra plus jamais dans son atelier » ; « Tailleur égale à faux type… » ; … Si vous n’avez jamais tenu des propos du genre après un rendez-vous manqué avec votre couturier, vous en avez sans doute déjà entendu de quelqu’un d’autre; surtout en cette période de fêtes où la clientèle afflue dans les ateliers de couture. A quelques jours du nouvel an, pas de repos pour les couturiers qui font des pieds et des mains pour respecter leurs rendez-vous avec les clients. Constat dans quelques ateliers à Ouagadougou.

Dans une pièce peu spacieuse qui sert d’atelier, une équipe de quatre personnes est à pied d’œuvre. Qui derrière une machine à coudre, qui prenant les dimensions d’un morceau de tissu avant de passer dessus un coup de ciseau… Les gestes, quoique mesurés, sont exécutés avec une certaine rapidité. Il faut se hâter, le mètre et le fil en main, car  dans quelques quatre jours, c’est la fête du nouvel an et il faut respecter les rendez-vous pris avec la clientèle.

Couture pour homme attend clientèle chez JC Confection

Nous sommes chez Bandé Confection, du nom du propriétaire de cet atelier situé au quartier populaire Zone une. Pas de clients dans la pièce, mais tout porte à croire qu’ils sont nombreux ces personnes qui ont laissé ici leurs morceaux de tissus pour les reprendre plus tard en tenues bien taillées. En effet, quand ces morceaux de tissu ne sont pas sous une machine à coudre, ils sont posés sur une table en attendant d’être découpés. Sur le visage d’Adama Bandé, le maître des lieux, se lit aisément le sourire d’un commerçant qui a fait de bonnes affaires. En effet, le quadragénaire se réjouit d’avoir reçu et pu satisfaire de nombreux clients à qui il a donné rendez-vous avant la fête de Noël. « Comme les années précédentes, nous avons reçu pas mal de clients qui ont pu avoir leurs tenues à temps », explique celui qui s’est spécialisé dans la couture mixte.

Se contenter de peu de clients pour être efficace

En ces temps de fêtes, la plupart des couturiers ont pour dénominateur commun, la longue file de clients qu’ils reçoivent. Mais c’est aussi une période d’incompréhensions avec la clientèle, quand le délai de confection des habits n’est pas respecté. Pour éviter ce désagrément, Adama Bandé a trouvé une astuce. Celle-ci consiste à limiter le nombre de clients selon les capacités de son personnel, histoire de ne pas avoir trop de pain sur la planche.

Adama Bandé s’est contenté d’un nombre limité de clients

« Pour le nouvel an, nous n’avons pas retenu plus de 25 clients. Comme nous avons pu le faire avant Noël, je pense que nous sommes sur la bonne voie pour respecter nos rendez-vous à cette fête», a expliqué celui qui considère la couture comme le premier métier au monde. Dans cette organisation du travail, la priorité est accordée aux clients habituels, explique le couturier, entre deux coups de pied sur la pédale de sa machine.  

La limitation du nombre des clients, le responsable de Bandé Confection n’est pas le seul  à en avoir le secret. Patron d’un atelier sis au quartier Dagnoën, Adama Tapsoba s’y connaît lui aussi.

Adama Tapsoba espère pouvoir satisfaire tous ses clients

Malgré une équipe forte d’une demi-douzaine d’employés, le proprio de Fad Mode ne veut pas être débordé par le travail, tenant à ce que toute confection soit parfaite : « Noël, nous nous sommes contentés d’un nombre raisonnable de clients que nous pouvions satisfaire. Nous avons juste reconduit cette méthode de travail pour la fête du nouvel an ». L’objectif, dit-il, c’est de finir les fêtes avec zéro malentendu avec un client pour travail mal ou non fait.

Faible affluence de la clientèle, la covid 19 accusée

Si Adama Tapsoba a dû limiter la réception de tenues à coudre pour satisfaire ses clients, il reconnaît tout de même que par rapport aux années antérieures, la ruée vers son atelier de couture a sensiblement baissé. Pour lui, la raison n’est pas à chercher loin. En effet, il pointe du doigt la situation sécuritaire et sanitaire dégradée. « L’insécurité avait déjà impacté plusieurs secteurs d’activités. On n’en a pas fini et la covid 19 est venu s’ajouter », a-t-il argué.

Chez d’autres couturiers, une faible affluence de la clientèle n’est pas seulement tributaire de la double situation sécuritaire et sanitaire. C’est du moins le constat que nous avons fait chez JC confection qui, selon son patron, Jean-Claude Ouédraogo, est à peine dans l’ambiance des fêtes. Selon celui qui vie de la machine à coudre depuis une douzaine d’années, son cas s’explique d’une autre manière. Spécialisé en couture pour hommes, il a argué que de manière générale, contrairement aux enfants et à l’autre moitié du ciel, ce n’est pas dans les habitudes de bien d’hommes d’envoyer une tenue à coudre chez le tailleur. « A l’occasion de la Noël, la plupart des confections que j’avais à faire était destinée à des enfants », nous a-t-il confié.

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Après notre visite dans quelques ateliers, nous pouvons dire que le métier de tailleur nourrit son homme à Ouagadougou, quand bien même la période des fêtes est celle des vaches grasses. Comme quoi il n’y a pas de sot métier, il suffit plutôt de s’investir dans ce que l’on sait faire le mieux.

Bernard Kaboré

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