Justice

Assassinat Thomas Sankara : un document confidentiel français attribue « un rôle actif » à Yé Arsène Bongnessan

Débuté à l’audience du 18 novembre, le témoignage d’Arsène Bongnessan Yé dans le cadre des évènements du 15 octobre 1987 s’est poursuivi ce 22 novembre 2021 à la Salle de banquets de Ouaga 2000. Interrogé sur son engagement politique aux côtés de Blaise Compaoré après l’assassinat de Thomas Sankara, l’ex-président de la Commission des relations extérieures a plutôt vu cet engagement comme un service rendu à son pays qu’à un homme. Le témoin s’est par ailleurs défendu d’avoir joué un rôle actif lors de ce coup d’Etat, contrairement à ce qu’indique un document confidentiel français brandi par la partie civile.

Arsène Bongnessan yé

A son deuxième jour d’audition, le témoin Yé Arsène Bongnessan s’est prêté aux questions des différentes parties, à savoir le parquet militaire, la partie civile et la défense.

Se revendiquant plus proche de Thomas Sankara que de Blaise Compaoré, le témoin a déclaré qu’il n’a jamais travaillé en fonction d’une personne mais en fonction de ses convictions.

Me Anta Guissé de la partie civile a voulu que le témoin revienne sur des déclarations tenues devant le juge d’instruction notamment ce qu’il sait des tensions entre le Burkina et d’autres pays avant les évènements de mi-octobre 87.

L’ancien membre du Conseil national de la Révolution a indiqué qu’à l’époque des faits, il était de notoriété publique que les relations entre le Pays des Hommes intègres et certains de ses voisins n’étaient pas au beau fixe. Et d’expliquer qu’avec la Côte d’Ivoire, un différend existait entre les leaders de la Révolution et le président Houphouët Boigny. Presque au même moment, au Togo, toujours selon Bongnessan, un commando parti du Ghana a attaqué en 1986 la capitale Lomé et que le Burkina était pointé du doigt. 3On a dit que le commando a été entrainé dans un village burkinabè par un officier du même pays. A l’époque, le président Sankara a répondu en disant que ni le nom du village ni le nom de l’officier n’existaient au Burkina », a expliqué le témoin.

Pascal Sankara et moi avons versé des larmes

Au sujet d’une entrevue avec Pascal Sankara, frère de Thomas Sankara dont Bongnessan a parlé devant le juge instructeur, Me Guissé a voulu en savoir davantage. Et le témoin d’expliquer que cette entrevue avec le frère du défunt président a eu lieu le 17 novembre 1987, soit deux jours après le coup d’Etat, à la faveur d’une rencontre entre le nouveau pouvoir d’alors et les membres de structures populaires. « Oui c’est exact, je l’ai rencontré à cette occasion et lorsqu’il m’a vu, nous avons tous les deux versé des larmes », a fait savoir l’homme à la barre.

Réagissant aux propos d’un d’autre témoin, à savoir, l’ancien patron des CDR, Pierre Ouédraogo, qui affirme avoir échangé avec Bongnessan le 17 novembre 87 au Conseil de l’entente. Pierre Ouédraogo a dit ici vous avoir trouvé au Conseil et que vous lui avez dit qu’il ne pouvait pas voir Blaise Compaoré et qu’il ne pouvait pas non plus rejoindre le secrétariat des CDR. Quel commentaire faites-vous de ces déclarations ? » A cette question de Me Guissé, l’ex-patron de la Commission des affaires extérieures a dit n’avoir jamais introduit Pierre Ouédraogo auprès de Blaise Compaoré encore moins à l’origine de son arrestation.

Poursuivant son interrogatoire, Me Guissé s’est attardé sur des documents confidentiels français versés dans le dossier et présentant Bongnessan Yé comme ayant joué « un rôle actif » pendant les évènements d’octobre 87. Selon ces documents qui émanent des services de renseignement français, le témoin faisait partie « des proches de Blaise Compaoré qui se sont éloignés de Thomas Sankara ». Bongnessan ferait aussi partie des cadres idéologiques d’alors et n’occupait pas le devant de la scène politique, toujours selon les notes de renseignements qui lui attribuent le poste de porte-parole de la Coordination  du Front populaire de Blaise Compaoré dès le 16 octobre.

Suite à la lecture de ces documents, Me Guissé a souhaité du témoin un commentaire. Mais en lieu et place, ce fut une autodéfense de ce dernier qui a nié l’exactitude de certains faits, relevant notamment que le Front populaire n’existait pas à la date du 16 octobre mais plus tard en mars 1988. « Je n’ai pas été porte-parole d’une structure qui n’existait pas », s’est-il défendu.

Bernard Kaboré

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