27e Journée de la tolérance : « une valeur cardinale dont la promotion est plus que jamais d’actualité »
16 novembre 1995-16 novembre 2022, voilà vingt-sept (27) ans qu’est commémorée la Journée internationale de la tolérance suite à l’adoption, par les Etats membres de l’UNESCO, d’une déclaration de principes sur la tolérance.L’Association pour la tolérance religieuse et le dialogue interreligieux (ATR/DI) saisit cette opportunité pour interpeler l’opinion publique sur le caractère impérieux de promouvoir la tolérance sous ses diverses dimensionsreligieuse, politique, culturelle, etc.
Pour mémoire, l’initiative de l’UNESCO est intervenue au lendemain de deux (02) tragédies en Afrique : d’abord suite à l’assassinat, le 21 octobre 1993, du président burundais Melchior Ndadaye, un génocide de plus de cent mille (100 000) Tutsis en moins d’un (01) mois est commis qui a débouché sur une guerre civile ; ensuite, le 6 avril 1994, le président rwandais, Juvénal Habyarimana, est tué dans un attentat contre son avion personnel. Un génocide d’environ huit cent mille (800 000) Tutsi est perpétré en l’espace de quatre (04) mois. Les années 1993 et 1994 sont donc des années de génocide en Afrique et particulièrement dans la région des Grands Lacs. Même s’il n’y a pas une relation de cause à effet évidente entre ces génocides et l’adoption du 16-Novembre comme la Journée internationale de la tolérance, ces tragédies ont probablement leur part de raison dans cette décision.
De nos jours, les génocides ne sont certes plus des préoccupations immédiates mais le monde et,singulièrement, notre continent vivent hélas dans l’ère de la radicalisation et de l’extrémisme violent caractérisée par l’effritement des relations intercommunautaires et interconfessionnelles, les replis identitaires, la constitution de groupes transnationaux armés qui sèment la mort et la désolation et dont l’intention avouée est d’imposer leur religion aux adeptes des autres religions ou d’obliger leurs coreligionnaires à adopter les préceptes et les pratiques de leur courant doctrinal. Ainsi, en Afrique de l’Ouest, les morts et les blessés se comptent par dizaines de milliers, les personnes déplacées internes par millions, les infrastructures socio-économiques détruites ou fermées par dizaines de milliers…L’autre conséquence de cette situation marquée par le terrorisme est la crise humanitaire qui frappe des dizaines de millions de personnes.
Ce tableau plus que sombre renforce l’impérativité de la promotion de la tolérance à l’échelle mondiale, africaine, régionale et nationale. En rappel, la tolérance est la valeur qui conduit la personne humaine à avoir du respect pour ce qu’elle n’admettrait pas instinctivement, par exemple lorsque cela est différent ou va à l’encontre de ses propres traditions, coutumes, convictions. Elle est un ingrédient nécessaire à la démocratie en ce que l’exercice de tout droit et de toute liberté exige en contrepartie un devoir de tolérance vis-à-vis de la jouissance, par autrui, de sa liberté et de son droit. Cependant, même s’il ne faut pas haïr l’intolérant, il faut faire preuve de vigilance à son endroit et œuvrer de sorte qu’il adopte des comportements tolérants.
Pour le Burkina Faso qui est un pays multiethnique où vivent près de soixante-dix (70) groupes socio-ethniques et pluriconfessionnels avec une dizaine de religions (dont les principales sont, par ordre alphabétique, le christianisme, l’islam et les religions traditionnelles), l’existence de la République et la construction de l’Etat-nation ne sont possibles sans une bonne dose de tolérance au sein de la collectivité politique. Dans cette optique, tous ceux qui détiennent une part de pouvoir ou d’autorité (chefs traditionnels et coutumiers, leaders religieux, responsables politiques et administratifs, opérateurs économiques…) ont, à n’en pas douter, un devoir d’exemplarité. Ce devoir d’exemplarité est d’autant plus à l’ordre du jour que les autorités de la Transition, à travers la charte, en font, à juste titre, leur cheval de bataille.
Fait à Ouagadougou, le 16 octobre 2022
Pour l’ATR/DI, le Secrétaire Permanent
Drissa Modeste SESSOUMA