Société

Terrorisme, stigmatisation communautaire : la posture à adopter, selon un internaute

Depuis que 28 personnes, appartenant à un même groupe ethnique selon des informations concordantes, ont été tuées à Nouna au lendemain d’une attaque terroriste contre un quartier général de dozos, la question de la stigmatisation en lien avec la lutte contre le terrorisme occupe grandement l’actualité. Chacun y va de ses analyses et commentaires avec l’objectif de renforcer la cohésion sociale. Dans cette tribune, Paz Hien, un internaute donne son opinion sur le sujet.

Selon l’auteur de la tribune, ”tenir un discours stigmatisant peut être un terreau fertile au terrorisme” (Source photo d’illustration: Studio Yafa)

Cela a été dit et répété à maintes reprises. Certains ont fini par comprendre et changer leur perception et leur langage; d’autres ont compris mais ont refusé de changer leur langage en toute mauvaise foi. Enfin certains n’ont toujours pas compris et c’est à eux que je souhaite m’adresser car j’estime que c’est méchant de laisser les peulh se défendre seuls face à toute cette vague de stigmatisation; c’est une autre forme de complicité à leur supplice. C’est aussi vrai par ailleurs qu’il y’a des peulh non-terroristes mais dont le langage ne facilite pas la défense des peulh innocents face au terrorisme.

Mon postulat est un devoir humain et humaniste face au risque d’un péril grave et imminent si le risque n’est déjà pas consommé. N’étant pas peulh et n’ayant pas d’alliance familiale quelconque avec les peulh, on ne me reprochera pas de défendre des intérêts partisans surtout quand on sait que d’où je viens, ma communauté a eu plusieurs démêlés avec la communauté peulh.

Oui, la majorité des terroristes connus sont des peulh (référence faite aux jugements des tribunaux et aux listes de personnes recherchées et aux résultats des opérations militaires).La gendarmerie nationale du Burkina estime à entre 2000 et 3000 combattants terroristes sur le sol burkinabè. Exagérons en allant à 10.000 combattants et supposons qu’ils soient tous peulh. Sachant que nous avons entre 2 et 3 millions de peulh au Burkina, cela représentent moins de 0,5% de cette communauté. Que faisons nous des 99% ? On les rend tous complices? Imaginez 25% qui…non je n’ose pas y penser.

La vérité est la suivante: Une petite minorité de peulh se sont engagés dans le terrorisme en y étant initiés par des forces extérieures qui ont exploités leurs douleurs et revendications pour les radicaliser. Cette minorité a obligé des familles peulh à engager leurs enfants sous peine d’être tués et d’autres ont vu leurs biens confisqués. Ce sont les premières victimes du terrorisme. Ces victimes ont été sommées de couper tout lien avec les forces loyalistes. Celles qui ont contrevenu à ces injonctions ont été tuées. Oui, beaucoup ne le savent pas, mais des civils peulh ont été tués par des terroristes peulh, donc des terroristes tout court.

Dans certaines familles, des enfants ont été enrôlés par les terroristes à l’insu des parents, tout comme en ville ici des parents sont surpris qu’on vienne leur dire ce que leurs enfants font dehors. Ces enrôlés vont combattre dans des zones et reviennent sans que leurs proches ne sachent, pendant que leurs familles les croient totalement innocents. Et il peut arriver donc qu’ils soient pistés et retrouvés dans une famille. Si le pisteur manque de discernement, il pourrait s’en prendre à toute la famille faisant ainsi des innocents.

Lorsque la famille découvre, elle est immédiatement menacée de mort par le concerné non sans que ce dernier n’ait essayé d’embarquer tout le monde. Les cas comme Yirgou et autres (où il y’a eu beaucoup de victimes civiles) sont utilisés pour radicaliser les proches en leur disant que de toutes les façons s’ils refusaient, le camp adverse (les forces loyalistes) les tueraient tous à l’occasion.

La proximité ethnique et religieuse est la principale approche des terroristes. Et les principaux arguments sont la marginalisation de la communauté, la stigmatisation de celle-ci et la présentation d’une mission divine avec un boost de finance.

On comprend alors que tenir un discours stigmatisant peut être un terreau fertile au terrorisme, tout le contraire de ce qu’on vise comme objectif.
Au contraire le discours devrait tendre à encourager les peulh à rester dans la république et à compatir à leurs supplices puisqu’ils souffrent aussi.

Est-ce que certains savent qu’il y’a des peulh FDS qui luttent contre le terrorisme, qui aident à traduire les messages de certains HANI, qui servent de guides dans certains endroits et qui sont des agents du renseignements? 
Oui les leaders peulh doivent clairement prendre position contre le terrorisme et sensibiliser les membres de leur communauté sur le combat à mener. Mais ils doivent le faire au même titre que tous les leaders communautaires dans le pays qu’ils soient religieux, ethniques, politiques ou d’opinion. Laisser cette tâche aux seuls leaders peulh est une autre forme de stigmatisation.

Ce que je souhaite que vous reteniez de ce long post que je n’ai pas l’habitude de faire: 
Les Peulh ne sont pas des terroristes même si beaucoup de terroristes sont peulh. Les peulh sont aussi victimes du terrorisme.

Paz Hien

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