Les Humeurs de Barry : Gare au garnement qui fera obstacle à mon épanouissement
Que les années passent ! Et avec le temps, les certitudes deviennent incertitudes. Rien qu’hier en effet, je me suis surpris à m’offusquer du nombre d’années que nos rejetons passent à user leur fond de culotte sur les bancs de l’école. J’en étais estomaqué. Estimons qu’un mouflet commence par la petite, moyenne et grande sections : 3 années. CEP et entrée en sixième: 6 années. Premier cycle : 4 années. Second cycle : 3 années. Enfin, l’université : 5 années pour un master. Si l’on fait le compte, mine de rien, ça fait plus de 20 années de sa vie à l’école, à condition qu’il n’ait jamais redoublé. Vingt ans et plus, ça fait trop dans un pays dont l’espérance de vie est faible. Et ce n’est pas fini : à la fin des études, la grande hantise reste l’obtention d’un hypothétique boulot, pour son plaisir et aussi pour un retour sur investissement pour nous, pauvres parents qui nous sommes ruinés notre vie durant en frais de scolarité, argent de poche, carburant, réparations et autres frais de sortie.
A votre avis ça peut coûter combien ? Moi, j’ai ma petite idée et à bien y réfléchir, j’aurais préféré investir plus utile pour l’enfant, en convertissant une bonne partie des dépenses liées à sa scolarité en achat de vaches, par exemple. Ce serait un joli cheptel pour le petit et un grand soulagement pour les parents. Je suis très sérieux quand je le dis. Et même que si à ses dix ans je lui avais fait une petite échoppe de vente de bonbons, il était à espérer que 17 ans plus tard, ça pourrait accoucher d’une jolie superette.
Vous me direz que je raisonne dans l’absurde et que je rame à contre-courant, mais il faut bien qu’un jour, nous crevions cet abcès qu’est la durée des études de nos enfants, qui nous éreinte à tous points de vue. Normal, qu’on mise tout sur les fruits de nos entrailles, diront ceux qui s’estiment responsables. Mais, voyez-vous, au soir de votre vie, ce sont ces mêmes garnements devenus grands qui joueront les moralisateurs et censeurs, vous empêcheront de vous épanouir. Et en toute impunité et avec des remontrances du genre : «Papa, le médecin ne vous a pas interdit l’alcool, le sucre, la viande et le sel ?». Et quoi d’autre encore ? Et ce sera bien fait pour nos gueules, mais si d’aventure un de mes rejetons joue à ce jeu, je le maudirai à jamais.
Issa K. Barry